Photo: Bundesarchiv

La société mère de RTL a un sombre passé allemand.

Les Luxembourgeois peuvent être fiers de beaucoup de choses. Le Kachkéis, Luxair et tout ce qu’il y a de bon dans l’argent. Mais il y a quelque chose qui dépasse les frontières de notre petit pays et qui nous a valu une reconnaissance mondiale. Il s’agit de la seule et unique RTL, alias Radio Télévision Luxembourg, bien sûr. L’identité luxembourgeoise est déjà présente dans le nom.

Peu de gens le savent : derrière notre cher média luxembourgeois, il y a aussi un élément non luxembourgeois. Pas le genre de non-luxembourgeois auquel on pense quand on dit „trois fois non“ à un étranger. Il s’agit de la sympathique petite entreprise familiale allemande Bertelsmann. En réalité, elle n’est pas si petite que ça. Avec un chiffre d’affaires de plus de 20 milliards d’euros par an, c’est même la plus grande entreprise de médias d’Europe. Et pourtant, c’est une famille terriblement sympathique.

En 1835, Carl Mohn a fondé la maison d’édition. Il imprime des hymnes et de la littérature religieuse et transmet la maison d’édition à ses fils, qui la transmettent à leur tour à leurs fils, qui la transmettent à leur tour à leurs fils… et ainsi de suite, de Mohn en Mohn. Jusqu’à ce que la petite famille devienne très grande. L’année 1933 est une année charnière. À cette époque, le directeur des éditions, l’arrière-petit-fils de Carl, Heinrich Mohn, a la bonne intuition de s’adapter aux conditions du marché : Il s’est enrôlé comme „förderndes member“ dans la SS et a adapté le programme de fiction de Bertelsmann aux conditions du gouvernement allemand de l’époque - qui se trouvait être nazi, mais qui aurait pu le savoir à l’époque ?

Le fait que Bertelsmann soit ensuite passé à l’impression d’ouvrages antisémites et nationaux-socialistes à grande échelle et était très proche d’un certain Goebbels, que Bertelsmann ait également imprimé et envoyé de la propagande nazie pour les soldats au front - les „éditions de campagne“ ont été tirées à 19 millions d’exemplaires en 1944 - n’avait que des raisons purement économiques.

Un vrai libéral

On peut dire la même chose des travailleurs forcés juifs qui ont dû travailler pour les imprimeries Bertelsmann en Lituanie : Toujours plus d’économie que d’idéologie.

M. Mohn aurait bien entendu accepté d’autres travailleurs forcés si cela avait été plus conforme à l’esprit de l’époque - Roms, musulmans, hindous - l’appartenance ethnique ou religieuse n’avait certainement aucune importance pour son âme noble. Un vrai libéral !

Reinhard Mohn, le fils de Heinrich, s’est quant à lui porté volontaire dans l’armée de l’air nazie, est devenu lieutenant pour les nazis dans les années 1940 et a même participé à une mission de guerre en Afrique du Nord avant de reprendre la maison d’édition. Pourtant, il faut bien le dire : Tout cela n’était certainement qu’une grosse erreur. Une erreur qui a fait la grandeur de la maison d’édition. Jusqu’à sa mort en 2009, le sympathique fils, qui a lui-même dirigé des nazis à la guerre, était le propriétaire de la maison d’édition. Aujourd’hui, c’est sa veuve, Liz Mohn. Et qu’a-t-elle à voir avec son mari sur le plan idéologique ? Vous voyez que les liens avec le passé nazi ne sont qu’extrêmement, extrêmement indirects, entrelacés, avec plusieurs générations et des centaines de cousins au cinquième degré, de sorte que cette construction complexe peut difficilement être démêlée. Et de toute façon, que voulez-vous faire avec de si vieilles histoires ?

Bertelsmann, après tout, est bien plus que cela. Une société sympathique qui rachète d’autres entreprises et en tire les derniers bénéfices en licenciant des employés et en supprimant des programmes, pour ensuite revendre à prix d’or l’entreprise ainsi sauvée. Il en va de même ici : Tout cela n’est pas le fruit d’une quelconque hostilité envers l’humanité, mais le signe d’un bon sens des affaires. Et qui peut reprocher cela à une entreprise ?

En pratique, RTL appartient à Bertelsmann

Bertelsmann, grâce à son lieutenant nazi Reinhard Mohn, est aussi une fondation d’utilité publique, pour être précis, une facilité d’évasion fiscale et aussi une organisation de lobbying féroce qui a presque réussi à abolir le droit public en Allemagne. Malheureusement, ce souhait n’a pas encore été exaucé - mais ce qui ne l’est pas peut encore l’être. Comment maintenir un monopole européen en vie et l’éliminer alors qu’il existe des radiodiffuseurs qui représentent simplement les intérêts du grand public et reçoivent donc également des fonds publics ?

Bien sûr, les choses sont différentes lorsque l’on peut soi-même obtenir des fonds publics. Dans ce cas, il n’est pas nécessaire de demander deux fois. Notamment au… Luxembourg ! RTL Luxembourg reçoit chaque année 10 millions d’euros de l’État, c’est-à-dire des contribuables. En pratique, RTL appartient à Bertelsmann et peut transférer l’argent directement à la société mère en tant que profit privé. Attendez un peu, et qu’est-ce que le Luxembourg en retire en réalité ? C’est exact ! Des emplois très précaires (le sens des affaires, vous savez) et une chaîne de télévision „publique“.